18,189

18,190
Si la pollution liée aux activités portuaires a très vite été une priorité de l’agenda de la gestion environnementale, les pays d’Afrique de l’Ouest peinent encore à prendre ce train en marche. Entre manque de moyens et directives peu lisibles, la mise en œuvre des dispositions de la convention MARPOL 73/78 en Afrique de l’Ouest est le récit d’un mariage difficile.
MARPOL 73/78
Derrière le terme MARPOL 73/78, se cache une convention internationale traitant de la prévention de la pollution du milieu marin, qui a été adoptée à l’Organisation Maritime Internationale (OMI) en 1973. Entre 1976 et 1977, des accidents impliquant des navires-citernes ont contraint les acteurs à mettre en place un protocole en 1978. Ce protocole de 1978 a été intégré à la convention de 1973 qui n’était pas encore entrée en vigueur. Ainsi est né MARPOL 73/78.
Cet outil qui a été amendé au fil des ans comporte six annexes techniques. Ainsi, l’annexe I traite de la prévention de la pollution par les hydrocarbures tandis que l’annexe II “précise les critères applicables aux rejets et décrit les mesures de prévention de la pollution par des substances liquides nocives transportées en vrac.” indique l’OMI. L’annexe III établit les règles de prévention de la pollution par les substances nuisibles transportées par mer. L’annexe IV quant à elle, vise la prévention de la pollution par les eaux usées des navires. L’annexe V cible les ordures produites par les navires et l’annexe VI régule la pollution atmosphérique issue de l’activité des navires.
Les impacts de MARPOL 73/78 sur les ports ouest-africains
Pour les différentes parties prenantes des activités économiques liées à la mer, MARPOL 73/78 offre un ensemble de mesures destinées à réduire la pollution. Aussi, sans surprise, toutes les nations ouest-africaines ont ratifié ce texte. Afin de maintenir leur compétitivité, les ports de la région s’efforcent de s’y conformer au moins, à minima. Néanmoins, ces ports sont confrontés à un faisceau de difficultés qui compliquent la mise en œuvre des dispositions portées par la convention MARPOL 73/78. En effet, celle-ci dispose par exemple que : « les ports doivent mettre à la disposition des navires des facilités de réception (PRF) afin de traiter les déchets qu’ils produisent ». Or, à ce jour, peu de ports ouest-africains offrent ces facilités.
Les ports doivent également se doter de directives claires pour la gestion des eaux de ballast issues de l’activité des navires. Par ailleurs, les ports doivent avoir des mesures destinées à faire face à des cas de pollution par les hydrocarbures. Hélas, la marge de progression reste importante.
Bien que certains ports disposent de politiques environnementales et de directives claires, ils manquent de compétences, de technologies, de ressources humaines et financières adéquates pour implémenter les mesures conformes aux standards internationaux. Beaucoup de ports de la région ont ratifié les conventions maritimes internationales mais manquent de capacité pour créer le cadre législatif adéquat à leur mise en œuvre optimale.” estime Harry Barnes-Dabban1, responsable de la gestion de l’environnement auprès de l’autorité portuaire du Ghana (GPHA).
Loin d’être limité à de simples considérations techniques, ces difficultés ont parfois des conséquences dramatiques sur les populations africaines. Ainsi, l’opinion internationale reste encore marquée par le drame du Probo Koala. Le déversement de déchets toxiques à Abidjan en 2006 par ce bateau battant pavillon panaméen qui avait d’abord été refoulé du port d’Amsterdam, traduit bien les difficultés auxquelles sont confrontés les ports africains. Une mise en application stricte de la convention MARPOL 73/78 aurait empêché le déversement des déchets toxiques du Probo Koala sur les décharges d’Abidjan et la mort de 17 personnes.
Perspectives
En dépit des défis, la situation n’est cependant pas désespérée. L’implémentation vigoureuse d’un ensemble de mesures innovantes pourrait permettre aux pays d’Afrique de l’Ouest d’améliorer la gestion de leurs déchets issus des activités portuaires. Ainsi, Fabrice Metonwaho2 suggère la mise en place d’un modèle basé sur celui de Singapour qui commence par la mise en place d’une tarification juste des déchets, la maximisation du recyclage de ces déchets par la construction d’infrastructures adaptées, la conversion d’une partie de ces déchets en énergie et enfin, en cas de stricte nécessité, l’enfouissement. Ces actions doivent aller de pair avec un cadre réglementaire révisé, offrant de la clarté et permettant au secteur privé de s’impliquer efficacement dans la gestion de ces déchets.